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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/200

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VI

Nous avons entendu Tertullien définir la mentalité dont il constatait les ravages dans sa ville natale, à Carthage.

À l’autre bout du monde romain, en Phrygie, une épitaphe en vers, malheureusement incomplète, qui doit avoir été gravée dans ces premières années du iiie siècle[1], offre, après quelques considérations d’un épicurisme assez banal[2], l’amorce d’une injurieuse allusion à la doctrine de la résurrection.

Un certain Gaius, « homme d’affaires exercé aux Muses », ainsi qu’il se dénomme lui-même, y rappelle les bons sentiments qu’il a manifestés, de son vivant, à sa femme, à ses enfants, à ses amis ; le souci qu’il a eu du bonheur des autres. Il invite ceux qui lui survivent à bien profiter de la vie — qui ne dure pas toujours — et à recueillir l’avertissement que leur donne la pierre sous laquelle il est enseveli. Suit un vers ainsi conçu : « Certes, tous les malheureux (qui croient) à la résurrection. » À partir d’ici, l’inscription garde son secret : les quatre vers ïambiques où Gaius avait dû dire leur fait à ces naïfs sont illisibles, et Ramsay a renoncé à les déchiffrer. Quelque main vengeresse les martela sans doute, par dépit de ces joviales et paisibles négations[3].

  1. Ramsay, Cities and Bishoprics, t. II, p. 386. Inscription d’Emirjik.
  2. Voy. Galletier, Étude sur la poésie funéraire romaine, d’après les inscriptions, Paris, 1922, p. 15 et 80.
  3. F. Cumont, dans une communication privée, adressée à M. Ramsay, écrit ceci (op. cit., p. 386) : « Il me semble surprendre dans ce morceau une véritable polémique contre les idées nouvelles qui se répandaient dans l’entourage du défunt. »