Aller au contenu

Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rent, la vérité demeure étrangère. » À ces prétendus oracles, Porphyre lie les remarques suivantes : « Hécate l’appelait donc un homme très pieux ; son âme disait-elle, comme celle des autres hommes pieux, a bénéficié, après qu’il fut mort, de l’immortalité ; mais c’est par ignorance que les chrétiens l’adorent. — À ceux qui lui demandaient : Pourquoi donc fut-il condamné ?, la déesse répondit par cet oracle : Le corps est toujours exposé aux exténuantes tortures ; mais l’âme des justes repose dans la céleste demeure. Toutefois, cette âme a été pour d’autres âmes, auxquelles les destins n’ont pas permis d’obtenir les faveurs des dieux et de posséder la connaissance de Jupiter immortel, une fatale occasion de choir dans l’erreur. Voilà pourquoi les dieux les haïssent : ceux dont le destin n’a pas voulu qu’ils connussent Dieu et reçussent les faveurs des dieux, il les a inévitablement fait tomber dans l’erreur. Mais il était lui-même un juste et, comme les justes, il a été admis dans le ciel. Aussi ne le blasphèmeras-tu pas, mais tu prendras en pitié la démence des hommes : de lui à eux, aisé est le péril, et rapide en est la pente[1] ! »

Eusèbe de Césarée a donné dans sa Démonstration évangélique[2] une partie de ce passage dans le texte grec original. Seulement il supprime presque toutes les observations désobligeantes sur les chrétiens[3]. Cela lui permet de tirer parti du témoignage rendu par les dieux eux-mêmes au Christ.

Vous voyez, s’exclame-t-il, que loin de passer pour un magicien et un charlatan, notre Sauveur Jésus, le Christ de Dieu, est reconnu comme rempli de piété, de justice, de sagesse, et comme un habitant des célestes demeures[4].

  1. Lactance allègue dans les Instit. div., IV, viii, 13, un « oracle » grec, conçu dans un esprit analogue, qu’il a peut-être tiré de Porphyre. C’est une réponse d’Apollon de Milet, consulté sur la divinité du Christ : « Il était mortel par la chair, sage par ses œuvres merveilleuses. Mais condamné par le jugement des Chaldéens, il fut cloué à la croix et subit une mort douloureuse. »
  2. III, 7 (Heikel, p. 140). Son texte correspond à celui d’Augustin depuis les mots : « Ce que je vais vous dire paraîtra peut-être paradoxal. »
  3. Il conserve seulement les mots ἣν σέβειν ἀγνοοῦντας τοὺς χριστιανούς.
  4. Bossuet a cité les oracles de Porphyre dans le même esprit qu’Eusèbe, chez qui il les avait sans doute pris (Disc. sur l’Hist. universelle, seconde partie, chap. xxvi) : « Paroles pompeuses et entièrement vides de sens,