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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/24

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3o Quant à l’expression nosos, maladie, pour désigner les agitations politiques, M. Lösch a fort bien montré qu’elle n’est nullement une nouveauté, qu’aurait suscitée l’inquiétante diffusion de la foi nouvelle. L’équation στάσιςνόσος avait été posée par Platon dans le Sophiste (228 A), à propos des troubles de l’âme. Et cette identité entre la « discorde » et la « maladie », Platon l’avait transposée lui-même dans l’ordre politique : « Tout homme incapable de participer à la pudeur et à la justice doit être mis à mort comme un fléau de la cité (ὡς νόσον πόλεως[1]) ». Depuis lors la comparaison, simplifiée en métaphore, était devenue courante dans la langue politico-juridique des Grecs. On la rencontre chez Xénophon, chez Démosthène, chez Polybe, chez Diodore, chez Galien, chez Plutarque, etc. Claude parle donc — ou sa chancellerie le fait parler — d’une façon toute traditionnelle, et selon le formulaire coutumier, pour désigner les tumultes, les séditions dont il s’emploie à prévenir le retour.

Ce que Claude redoute des Juifs à Alexandrie, ce n’est pas leur messianisme, si hétérogène au judaïsme hellénisé ; c’est leur nombre et l’antisémitisme qui s’ensuit. Tuteur naturel de la paix, Claude redoute que, de proche en proche, la réaction antisémite provoquée par un afflux nouveau de Juifs dans Alexandrie ne se propage à travers le monde romain et n’y allume de fâcheuses discordes.

Nous n’avons pas le droit d’annexer sa lettre aux textes profanes où le christianisme naissant est certainement visé.

  1. Protagoras, 322 D.