Aller au contenu

Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mesure d’apprécier directement les méthodes de Longin. Le fameux Traité du Sublime lui a été attribué à tort, et il ne nous reste de lui que peu de chose. Mais il passait de son temps pour un philologue de premier ordre. Plotin, qui lui refusait le nom de philosophe, lui octroyait pleinement celui-là : « φιλόλογος μὲν ὁ Λογγῖνος, φιλόσοφος δὲ οὐδαμῶς[1] ». Porphyre le vante comme un esprit d’une critique acérée dont la supériorité était de tous reconnue[2], et il prit dans son commerce le goût du savoir positif, des comparaisons de textes, des discussions chronologiques. Il composa même une grande Chronographie, qui s’étendait depuis la prise de Troie jusqu’au règne de Claudius II (268-270 ap. J.-C.) : les fragments qui subsistent permettent de conjecturer qu’il lui avait donné comme substructure une documentation assez soignée[3]. Dans sa Vie de Plotin, il manifeste un certain souci — rare à cette époque — d’indiquer les étapes du développement intellectuel du philosophe et la qualité diverse de ses œuvres selon les périodes de sa vie. Ces observations ne sont pas très nuancées, mais enfin il a cru devoir les formuler. Proclus rapporte qu’au cours d’une explication du Timée de Platon, Amélius signalait à ses auditeurs une « aporie », c’est-à-dire une difficulté apparemment insoluble. Porphyre, entrant dans la salle pendant cet exposé, fit remarquer que la prétendue « aporie » venait d’une faute de texte, et qu’une correction très simple la ferait disparaître[4]. Il avait le goût de la controverse, et il y faisait toujours bonne figure.

  1. Porphyre, Vie de Plotin, § 14.
  2. Ibid., §§ 20 et 21.
  3. C. Müller, Fragm. historicorum graec., t. III, p. 688 et suiv.
  4. Bidez, op. cit., p. 46.