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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/308

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bien il n’y a rien compris. Des contradictions, nos saintes Lettres sont aussi éloignées d’en offrir, qu’il était éloigné lui-même de la foi et de la vérité.

C’est surtout saint Paul et saint Pierre qu’il déchirait, ainsi que les autres apôtres, qu’il traitait de semeurs de mensonges, et présentait comme des gens grossiers et ignorants, dont plusieurs gagnaient leur vie en exerçant le métier de pécheurs. On aurait dit qu’il lui déplaisait que cette religion ne fût pas sortie de l’imagination d’un Aristophane ou d’un Aristarque !

C’est justement leur manque de culture qui écarte des apôtres tout soupçon d’avoir voulu feindre, et d’avoir été capables de le faire. Le moyen qu’un ignorant combine une doctrine cohérente, alors que les plus doctes philosophes, Platon, Aristophane, Épicure, Zénon, ont avancé des idées contradictoires et qui ne cadrent pas ensemble ? Le propre du monsonge est de se démentir soi-même…

Cet auteur affirmait que le Christ lui-même, chassé par les Juifs, avait groupé neuf cents hommes et exercé le brigandage. Qui oserait s’inscrire en faux contre une si haute autorité ?… Il essayait d’affaiblir l’importance des miracles du Christ sans toutefois les nier, et voulait démontrer qu’Apollonius (de Tyane) en avait fait de pareils et même de plus grands. Je m’étonne qu’il ait passé sous silence Apulée, dont on cite communément tant de prodiges ! Mais pourquoi donc, ô tête folle, personne n’adore-t-il Apollonius comme un Dieu — sauf toi peut-être, bien digne d’un tel dieu, avec lequel tu seras éternellement puni par le Dieu véritable. Si le Christ était un magicien, parce qu’il a accompli des prodiges, Apollonius s’est montré plus habile encore, puisque, à t’en croire, au moment où Domitien se disposait à le punir, il disparut soudain de son tribunal, — tandis que le Christ, lui, se laissa prendre et attacher à la croix !

Ce polémiste a peut-être voulu incriminer l’orgueil du Christ pour s’être donné comme un dieu, afin de faire ressortir la modestie d’Apollonius qui, plus grand thaumaturge, n’a nullement réclamé sa déification. Ce serait sottise de croire qu’Apollonius n’ait pas voulu d’un titre qu’il aurait souhaité sans nul doute, s’il avait pu l’obtenir. On ne refuse pas l’immortalité, surtout quand comme lui « on est adoré, nous dis-tu, par certains, comme un dieu, et que l’on se voit élever une statue, sous le nom d’Hercule Alexicacus, par les habitants d’Éphèse, chez qui elle est encore honorée ». Apollonius n’a pu être cru dieu après sa mort, parce qu’il était constant qu’il n’avait été qu’un homme et un magicien… « Je n’admets pas, déclare notre auteur, que, si Apollonius ne passe pas pour dieu, c’est qu’il ne l’a pas voulu ; non, mais