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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/307

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fin : l’audacieux fut torturé et précipité dans la mer[1].

Il paraît probable que Hiéroclès rédigea son ouvrage, peu après le moment où l’édit de persécution fut lancé[2].

On se rappelle que Chateaubriand a utilisé ce personnage dans ses Martyrs. Il a puisé chez Lactance les éléments du portrait terrible que trace Eudore, et cela non seulement dans le passage relatif à Hiéroclès lui-même, mais aussi dans celui du sophiste innommé. Seulement, il en a modernisé les traits en prêtant à son Hiéroclès le jargon du « philosophisme », genre xviiie siècle.

Voici le texte de Lactance sur Hiéroclès[3].

L’autre traita le même sujet d’une façon plus corrosive. Il appartenait alors à la catégorie des juges[4] et fut, au premier chef, responsable de la persécution. Non content de ce crime, il poursuivit de ses écrits ceux qu’il avait déjà cruellement frappés. Il composa deux opuscules qu’il intitula non pas « Contre les Chrétiens » (il ne voulait pas avoir l’air de les pourchasser, comme un ennemi) mais « Aux Chrétiens », prenant aussi le rôle d’un conseiller humain et bienveillant.

Il se donnait du mal pour démontrer que la Sainte Écriture n’est que mensonges et contradictions. Il soulignait les apparentes disconvenances de certains passages, et cela avec une telle insistance et en fouillant si avant, qu’on peut se demander s’il n’avait pas fait jadis partie de notre secte.

Si la supposition est exacte, quel Démosthène pourrait exonérer d’impiété un traître à la religion naguère embrassée avec ardeur, à la foi dont il avait revêtu le nom, au sacrement qu’il avait reçu ? Mais peut-être le hasard seul avait-il fait tomber entre ses mains nos saints Livres. Alors quelle témérité d’oser dissoudre ainsi ce que personnc ne lui avait expliqué ? Le fait est qu’ou bien il n’en avait rien appris, ou

  1. Ces faits sont racontés par Eusèbe, dans le « récension longue » des Martyrs de Palestine, v, 3 (trad. Grapin, III, p. 209).
  2. Harnack, Chronol. II, p. 117 pense à tort que Hiéroclès écrivit avant la persécution. Lactance dit en propres termes « … etiam scriptis eos quos adfixeret insecutus est ».
  3. Div. Inst., V, ii, 123 (Brandt, p. 405, lignes 22 et s.).
  4. Iudex, à cette époque, équivaut au mot « gouverneur ». Voir Daremberg-Saglio, III, i, 632.