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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/331

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recevoir la grâce du Christ, et, régénéré par elle, être délivré des ruines causées par mes iniquités. » Le comédien revêt la robe blanche des néophytes, et la cérémonie du baptême s’accomplit. — Mais un travail secret, depuis longtemps déjà, sans doute, commencé dans son cœur, vient de trouver son point d’aboutissement. Quand, pour achever la fiction, des soldats l’entraînent devant l’empereur, Genès proclame réellement sienne la foi dont il se jouait. L’empereur le fait fouetter, torturer, mettre à mort.

Dans son ensemble, cette passion ne jouit, devant la critique, que d’une autorité médiocre. On fait remarquer que nous en connaissons au moins trois répliques : un certain Celasinus se serait converti dans des conditions toutes pareilles, à Héliopolis, en Syrie, au début du ive siècle[1] ; un nommé Ardalion aurait fait de même, alors qu’il contrefaisait le martyre sur la scène ; le cas d’un Porphyre, sous Julien ou sous Dioclétien, se rapproche tout à fait de celui de Genès[2].

Il est probable que ce thème émouvant aura été assez largement exploité, à l’usage des fidèles. Et il est difficile de dire si c’est la passion de Genès, ou une autre, qui en a été le prototype. Mais rien n’interdit d’admettre que le mime, avide d’actualité, ait caricaturé, pour faire rire, les formes extérieures de la liturgie chrétienne. Nous avons même un témoignage non équivoque du regain de ces bouffonneries à l’époque de l’empereur Julien. Saint Grégoire de Nazianze remarque, dans son Apologie écrite peu après 362, que les païens pourchassent en tout lieu les chrétiens de leurs méchants propos :

  1. Jean Malalas, Chronog., XII, Corpus de Bonn, p. 314. Malalas dit « Héliopolis en Phénicie ».
  2. Anal. Bolland., 1910, 258.