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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/362

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XI

Un autre témoignage fort suggestif est celui que nous recueillons dans la Vie des Sophistes, d’Eunape de Sardes.

Né à Sardes, en Lydie, vers 345-346, Eunape fut confié aux soins du philosophe Chrysanthius que Julien « l’Apostat » devait associer, en 362, à ses desseins réformateurs, en faisant de lui un grand prêtre (ἀρχιερεύς) de Lydie. Chrysanthius lui inculqua un zèle ardent pour la religion hellénique et lui fit connaître la doctrine de Jamblique. Il passa quelques années comme étudiant à l’Université d’Athènes, où il suivit les leçons du rhéteur Prohaeresius. Il raconte lui-même qu’il se fit initier aux mystères d’Éleusis[1]. Il revint ensuite dans sa ville natale, et il y enseigna la rhétorique à son tour, non sans acquérir également une certaine compétence en médecine.

Il y entreprit une œuvre historique, dont nous n’avons plus que des fragments[2]. Elle couvrait la période entre Claude II (270) et le début du ve siècle. Mais il avait expédié en un seul livre — sur quatorze — les événements antérieurs à Julien, et s’était étendu sur l’histoire contemporaine, celle qu’il avait personnellement connue et vécue. Profondément blessé par les violences officielles qui, dans les dernières années du ive siècle, précipitèrent la chute du paganisme, Eunape y jugeait sans bienveillance les empereurs chrétiens : toutes ses faveurs, tout son enthousiasme

  1. Vie des Sophistes, éd. Boissonade (Didot), p. 475.
  2. Ces fragments, conservés principalement par Photius, Suidas, Constantin Porphyrogénète, ont été recueillis par C. Mueller, Fragm. Histor. Graecorum, t. IV (1668) p. 7 et s. (Didot) et par Dindorf, Histor. Gr. Min., t. I (1870), p. 205 et s. (dans la Biblioth. Teubner).