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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/40

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contristé de la rafle qui avait permis de délivrer Rome d’une peste aussi nuisible que la secte chrétienne (per flagitia invisos ; exitiabilis superstitio ; odio generis humani ; adversus sontes et novissima exempla meritos). Mais il ne peut s’empêcher de noter que, de l’avis général, la répression dépassa toute mesure. C’est qu’il n’envisageait lui-même sérieusement que deux hypothèses : ou bien c’était Néron qui avait fait mettre le feu à la ville ; ou bien il fallait incriminer le seul hasard[1]. Il ne se décide pas à prendre parti. Mais il relève si soigneusement les indices suspects dont l’opinion s’était emparée contre Néron, qu’il achemine ses lecteurs à une conclusion que, lui-même, en tant qu’historien, ne se reconnaît pas le droit de soutenir formellement.

Le procédé lui est, du reste, assez familier. Certains lui en font honneur comme d’une preuve de sa loyauté, qui lui interdit d’en dire plus qu’il n’en pense et de dépasser la ligne où s’arrêtent ses certitudes ; d’autres estiment que ces insinuations obliques, coulées à petit bruit, décèlent plus de prudence équivoque que de véritable fermeté morale.

Que ce fussent les chrétiens qui eussent réellement fomenté l’incendie, certains historiens modernes l’ont admis[2], en exploitant le correpti qui fatebantur de Tacite. Mais l’historien n’indique pas le « contenu » de leurs aveux. Ces mots peuvent fort bien signifier que la police arrêta d’abord un certain nombre de suspects, qui ne voulurent pas nier leur qualité de chrétiens. Dès lors,

  1. § 38. « Forte an dolo principis — nam utrumque auctores prodidere. »
  2. Ernest Havet, Le Christianisme et ses Orig. IV, 228 ; Carlo Pascal, etc. (bibliog. dans le Theolog. Jahrb. de 1901 et années subséq.).