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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/403

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que ce dieu qui se fâche, s’indigne, exige des massacres, songe à anéantir la race entière des Juifs[1] ? Conçoit-on le désastre de pareilles colères, si un dieu tout puissant était réellement capable de les éprouver ? La philosophie païenne veut que l’homme imite Dieu dans la mesure de ses forces ; et cette imitation consiste dans la contemplation des êtres[2], qui implique la suppression des passions, l’ « apathie[3] ». Mais chez les Hébreux, que peut être cette imitation ? Elle trouve pour modèle, chez leur Dieu, la colère, le dépit, une sauvage fureur.

Revenant sur la prétention juive, Julien observe que l’hypothèse d’une prédilection spéciale de Dieu à l’égard des Juifs a contre elle l’évidence de la civilisation supérieure qui s’est développée chez les Chaldéens, les Assyriens, les Grecs. Ces peuples ont eu congénitalement le goût des mystères et de la théologie, dont les Hébreux s’imaginent avoir reçu le privilège[4]. C’est chez eux que toutes les sciences — astronomie, géométrie, arithmétique, musique — ont pris naissance et réalisé leurs premiers progrès. Les Grecs peuvent se prévaloir d’une prestigieuse élite de grands hommes dans tous les ordres d’activité[5] ; les Romains montrent le magnifique épanouissement de leur puissance, préparée par les lois sages du « beau et bon Numa », fomentée par la protection divine, que tant de signes ont rendue manifeste.

  1. P. 190, l. 5.
  2. P. 192, l. 5.
  3. ἀπαθεία, au sens philosophique du mot, l’impassibilité.
  4. P. 193, 9.
  5. P. 104, 15. Julien fait défiler Persée, Minos, Éaque, Dardanus, après Platon, Socrate, Aristote, Cimon, Thalès, etc.