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D’autre part, la prétention de Julien à incarner « l’Hellénisme » et à se désigner comme l’héritier du patrimoine de la vraie culture, par opposition à la « barbarie », appelle également de sérieuses réserves. L’Hellénisme véritable croyait à la puissance de la raison pour expliquer le monde à l’homme et l’homme à lui-même ; il avait une confiance sans limites dans la force intelligente de l’homme, dès là que cette force s’applique méthodiquement à son objet. Julien, lui, aurait voulu soustraire aux investigations de la critique les idoles dont son imagination mystique était peuplée. J. Carcopino a remarqué avec grande justesse que sa prétention d’interdire comme scandaleux tout irrespect à l’égard des légendes de la mythologie « aurait exclu de l’Hellénisme, non seulement le chrétien Grégoire de Nazianze, mais les plus grands parmi les philosophes grecs du paganisme » et que « l’hellénisme confessionnel que Julien a servi en menaçant dans leur vie, et l’injure à la bouche, les Hellènes-athées comme Héraclius, n’est plus l’Hellénisme[1] ». « La théologie de Julien, note de son côté A. Puech[2], est une théologie dont l’esprit vient de l’Orient, et non point de la Grèce antique. Quand il traitait dédaigneusement les chrétiens de Galiléens, les chrétiens auraient pu lui répondre, presque sans exagération, qu’il n’était pas un Hellène, mais un Perse. »

    du sens critique, qui s’en étonnerait ? Un passage du Discours à l’Assemblée des saints (19, 1), de l’Empereur Constantin, révèle que beaucoup de païens se rendaient compte que les Oracles sibyllins — dont Constantin lui-même tirait parti — avaient été retouchés par une main chrétienne.

  1. Revue Historique, mars-avril 1931, p. 335 et s.
  2. Journal des Savants, fév. 1931, p. 54.