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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/434

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Au surplus, il ne partage nullement l’ardeur antichrétienne de Julien. Il va même jusqu’à le blâmer d’avoir porté un édit contre les maîtres chrétiens[1]. Il est tolérant par nature, et Valentinien Ier reçoit de lui de grandes louanges pour être resté un arbitre impartial entre les diverses religions, sans imposer à personne aucun culte[2]. Il est vrai qu’il rédige son histoire sous Théodose, vers la fin du ive siècle, et qu’il devait se sentir d’autant plus de goût pour la tolérance qu’elle n’était plus guère à l’ordre du jour.

Il garde, malgré tout, dans ses Res Gestae un certain franc-parler, et donne assez librement son opinion sur les hommes et les choses, sans émousser, par cautèle, la pointe de ses critiques.

Il censure, par exemple, la politique religieuse de Constance, ses façons de raffiner sur le dogme, la désorganisation qu’il introduisit dans les services de la poste, en la mettant trop souvent à la disposition des évêques.

Constance gâta la religion chrétienne, qui est claire et simple, en y mêlant une superstition de vieille femme. Plus porté aux interprétations subtiles qu’aux sages apaisements, il provoqua de nombreuses scissions, qu’il laissa s’aggraver et qu’il entretint par des discussions de mots. On vit des groupes d’évêques emprunter les relais publics pour courir deci delà, de « synode » en « synode », comme ils disent ; et ainsi, en essayant de ramener tout le culte à sa propre opinion, il énervait le service public des transports (rei vehiculariae succideret nervos[3]).

Il redoute les disputes religieuses, et il rappelle que, si

  1. XXII, 10, 7 « Illud autem erat inclemens, obruendam perenni silentio, quod arcebat docere magistros rhetoricos et grammaticos, ritus christiani cultores. »
  2. XXX, 9, 5.
  3. XXI, 16, 18.