Aller au contenu

Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/450

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

D’où, je vous prie, les philosophes et les poètes ont-ils tiré des choses si semblables aux nôtres ? Uniquement de nos mystères… S’ils les avaient prises dans leur imagination, il faudrait donc que nos mystères fussent la copie de rites qui ne sont venus qu’après eux, et cela est contraire à la nature des choses ; car jamais l’ombre n’existe avant le corps, jamais la copie ne précède l’original.

C’est au nom de ce dernier principe qu’il repousse dans le De Ieiuniis[1] les objections d’un contempteur des jeûnes chrétiens, qui les comparait au castum[2] d’Isis et de Cybèle. L’imitation est du côté païen, car « le mensonge se construit avec de la vérité ; la superstition s’aménage sur la religion ».

V

Il serait aisé de suivre, dans les écrits chrétiens, les survivances de cette théorie. Mais, pour bien se représenter les données du problème, il faut se rappeler les furieuses accusations de plagiat qui s’élevaient aussi du côté païen. Celse en est plein, nous l’avons vu ; il n’a presque aucun sentiment de l’originalité du christianisme, qui n’est à ses yeux qu’un conglomérat de larcins[3]. Avec la mythologie, les mystères, le mithriacisme, le stoïcisme, le platonisme, on aurait en mains presque tous les éléments de cette doctrine, impudemment composite. — Au temps même d’Augustin, le Manichéen Faustus déclarait aux catholiques : « Vous avez converti les sacrifices des païens en agapes, leurs idoles en martyrs à qui vous offrez les mêmes hommages ; vous apaisez les ombres des morts avec du vin et

  1. xvi (Reifferscheid, p. 296, l. 8 et s.).
  2. Fête marquée par des abstinences alimentaires et sexuelles, qui préparaient le Dies Sanguinis (24 mars).
  3. Voir plus haut, p. 118.