Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/96

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recueilli par un excerpteur, Abulfeda (mort en 1331), dont H. O. Fleischer a traduit l’œuvre en latin, à Leipzig, en 1831. Le passage est présenté comme extrait du Liber de Sententits Politiae Platonicae de Galien. Cet ouvrage n’est pas connu par ailleurs, mais on estime qu’il n’y a pas de raison décisive pour en révoquer en doute l’authenticité[1].

La plupart des gens ne peuvent suivre une démonstration avec une attention soutenue. Voilà pourquoi ils ont besoin qu’on leur serve des paraboles… C’est ainsi que de notre temps nous avons vu ces hommes qu’on appelle chrétiens tirer leur foi de paraboles. — Cependant ils agissent de temps en temps comme de véritables philosophes. Leur mépris de la mort, nous l’avons, à dire vrai, sous les yeux. J’en dirai autant de ce fait qu’une sorte de pudeur leur inspire de l’éloignement pour l’usage de l’amour. Il y en a parmi eux, des femmes et des hommes, qui se sont abstenus pendant toute leur vie de l’union sexuelle. Il y en a aussi qui, pour la direction, la discipline de l’âme et une rigoureuse application (morale), se sont avancés assez loin pour ne le céder en rien aux vrais philosophes[2].

Témoignage tout spontané et qui décèle à quel point Galien savait s’émanciper des aveugles hostilités de ses contemporains à l’égard du christianisme. Une bonne formation scientifique aide à la rectitude du jugement. Mais il arrive qu’elle favorise et fomente des dédains un peu sommaires pour toute conception qui dépasse la zone des faits, et confine à un autre « ordre ».

  1. M. Kalbfleisch (Festschrift Gomperz, 1902, p. 97) croit qu’un livre entier du travail de Galien sur les Dialogues de Platon — peut-être le VIe —, et une notable partie du livre suivant, étaient consacrés à la République, et que c’est là que devait se trouver le passage sur les chrétiens.
  2. « Hi tamen interdum talia faciunt qualia qui vere philosophantur. Nam quod mortem contemnunt, id quidem ante oculos habemus ; item quod verecundia quadam ducti ab usu rerum venerearum abhorrent. Sunt enim inter eos et foeminae et viri qui per totam vitam a concubitu abstinuerint ; sunt etiam qui in animis regendis coercendisque et in acerrimo studio eo progressi sunt ut nihil cedant vere philosophantibus. » Abulfeda, Historia anteislamica, éd. Fleischen, p. 109.