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Page:Lafenestre - Molière, 1909.djvu/134

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MOLIÈRE.

lui trop ému, comme le désir et le pressentiment d’une conception plus large et plus haute des forces mystérieuses qui gouvernent la vie.

Ainsi que les libertins bretteurs de Versailles, ses modèles, ce grand seigneur pourri garde, en ses déportements, une séduction de manières, une crânerie généreuse et désintéressée de courage qui, par instants, nous trompent et nous attendrissent. Cette même vanité du point d honneur, point d’honneur espagnol aiguisé par la finesse française, qui le rend incapable d’un remords et d’un repentir, devant la Mort et devant Dieu, comme de lâchetés honteuses pour un grand seigneur, lui ordonne d’exposer sa vie pour le premier venu que les malandrins attaquent dans un bois. Par la contradiction de ses actes et de ses pensées, par ses incohérences intermittentes d’impitoyables froideurs et de chaleureuses pitiés, celui-là reste encore bien un homme réel et vivant, comme il y en avait alors, comme il y en aura toujours.

Dans le personnel, masculin ou féminin, qui entoure Alceste et Don Juan, apparaissent aussi d’autres types, très variés, avec les qualités ou les défauts des gens de cour. Sans parler du doux Philinte, la contre-partie d’Alceste, politesse poussée jusqu’à la flatterie, indulgence voisine de l’indifférence, parfait galant homme, d’ailleurs, que de vérité encore dans Oronte, le poète-amateur, sa fausse modestie, sa suffisance irritable, dans la fatuité des deux marquis, Acaste et Clitandre ! De même que Philinte est devenu le type idéal de l’égoïsme aimable, du savoir-vivre mondain, l’ex-