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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/105

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BERLIN. LA COUR ET LA VILLE

que le comte Pückler est aveugle. Tout le monde à la cour et à Berlin se moque un peu de ses airs démodés : il est rempli de son rôle, bien qu’il n’ait que trente mille francs d’appointements pour le soutenir. Au demeurant, très inoffensif.

À quelques pas derrière lui s’avance l’empereur, donnant le bras à la princesse impériale : lui voûté, harassé, mais toujours bel homme ; elle, remarquable par la vivacité de ses yeux toujours jeunes. Toutes les têtes s’inclinent, non sans regarder aussi bien que possible, encore une fois, le visage du vieux monarque qu’un courant d’air peut abattre demain. Vient ensuite le prince impérial en cuirassier blanc, — l’uniforme qu’il porte le plus volontiers, bien qu’il n’en ait le droit que dans certaines occasions ; il sait pourtant que cette légère infraction à la discipline déplaît à son père. Il a l’air bien vieilli, fort soucieux, et n’a plus son clair regard d’il y a cinq ans encore. Il donne le bras à sa belle-fille, la princesse Guillaume, une bonne Allemande, grande, blonde, fraîche et souriante, ne faisant jamais parler d’elle.

Voici le prince Guillaume, futur prince héritier. De taille moyenne, — la stature va sensiblement en diminuant de l’aïeul au petit-fils, — il est