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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/104

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

et en mesure le parquet, un poste de gardes-cuirassiers en uniforme de grosse laine blanche, avec soleil sur la poitrine, hautes bottes et grands casques surmontés de l’aigle aux ailes éployées. Tous ces gardes sont des géants, mais parfois des géants mal faits, dont le visage petit, imberbe et rose semble tout épuisé par une croissance anormale ; le sabre au clair, ils vont se poster deux par deux aux portes. Souvent les gardes-cuirassiers sont remplacés par de vieux grenadiers de la garde qui portent les moustaches et les favoris, le haut shako, et les hautes guêtres d’autrefois.

Enfin un silence se fait : des sous-chambellans s’empressent et s’échelonnent le long de la haie. D’abord s’avance à pas comptés toute une hiérarchie de chambellans aux uniformes de plus en plus chamarrés, aux cannes de plus en plus symboliquement riches. Puis vient, solitaire et rutilant, le grand maréchal de la cour, le comte Perponcher, très haut, la moustache cirée à l’impériale, l’air d’un Monpavon égaré dans une féerie militaire. Le comte, qui est d’origine hollandaise et n’est pas peu fier d’entendre prononcer son nom à la française, occupe la première charge de la cour depuis quatre ans