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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/107

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BERLIN. LA COUR ET LA VILLE

Le cortège est grossi par une foule de jeunes princes allemands en garnison à Berlin. Dans le nombre se détache le jeune prince Léopold, fils de feu Frédéric-Charles. Il ne semble pas encore bien remis de la contrainte et de la terreur qu’inspirait à sa femme et à ses enfants le terrible hussard rouge qu’on voyait passer dans ces bals, toujours coi, la face et le crâne apoplectiques, gêné dans le carcan de son col crasseux, paré de colliers et de plaques comme un Moloch. Voici Moltke avec sa distinction mi-danoise, mi-anglaise ; des aides de camp, — le duc de Sagan et le comte Pourtalès, puis des généraux, etc.

Finalement, tout le monde se mêle et l’on se presse vers la salle de bal, où déjà l’orchestre a commencé l’éternel Beau Danube bleu. La Salle Blanche est bordée de deux côtés, et en vis-à-vis, de rangs de fauteuils : un côté pour la cour, l’autre pour les dames de tout rang. Au fond de la salle, se tient le corps diplomatique. Les embrasures des fenêtres, les banquettes, sont déjà envahies du pêle-mêle de casques, de shakos, sabres, sabretaches des danseurs, un véritable arsenal intéressant à étudier. L’empereur et le prince royal regardent quelques minutes les danses, puis se lèvent sans rien interrompre.