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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/218

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

et n’envoie pas sa photographie. Voyons, pas de visites à faire ; la répétition n’a lieu que demain matin, j’irai manger à une heure, puisque les restaurants de ce pays-ci ne servent qu’à partir d’une heure. D’ici là, j’ai le temps de travailler et de revoir la ville. Et à deux heures sonnant, j’attendrai la pianiste à l’éventail. Pourquoi a-t-elle souligné : « surtout j’aurai un éventail » ?

Après avoir déjeuné le dos contre un calorifère, Jean l’Estrelle s’installa au piano. Il se délia les doigts[1] et repassa sagement tout le programme de son concert du lendemain, bien qu’il en eût l’avant-veille joué une bonne moitié en public à Dresde.

Midi sonnant, Jean l’Estrelle, bien en garde avec ses doigts, descendit la rue Frédéric et

  1. Ici le manuscrit que nous possédons porte ces détails plus précis, souvenirs peut-être des moments passés avec Théo Ysaye. Il se délia les doigts avec les éternelles études de Chopin, ensuite soumit son quatrième doigt, toujours un peu récalcitrant, à une gymnastique effrénée et patiente, par une étude spéciale, éprouva les forces de son poignet en scandant deux fois de suite la fameuse deuxième élude de Rubinstein.