Aller au contenu

Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 8.djvu/270

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

par ébranler leur confiance dans les Wahabis, leur disant qu’Abdallah était nécessairement devenu leur ennemi depuis qu’il l’avait abandonné au jour du dernier combat, et qu’il cherchait à s’en venger. Qu’en allant dans le Neggde, ils se précipitaient volontairement sous la domination d’Ebn-Sihoud, qui les écraserait de contributions, et chercherait à leur faire supporter tout le poids d’une guerre désastreuse. Qu’ayant une fois déserté sa cause et s’étant tirés de ses griffes, il ne fallait pas faire comme l’oiseau qui, échappé au fusil du chasseur, va tomber dans le filet de l’oiseleur. Enfin, je m’avisai de la fable du faisceau, pensant que cette simple démonstration aurait de l’effet sur ces âmes naïves ; et je me déterminai à en faire devant eux l’application. Les ayant exhortés à se réunir pour résister à toute oppression, je pris des mains des scheiks une trentaine de djérids, et j’en présentai un à l’émir Fares, le priant de le rompre ; ce qu’il fit aisément. Je lui en présentai successivement deux, et puis trois, qu’il rompit de même, car c’était un homme d’une grande force musculaire. Ensuite je lui présentai tout le faisceau, qu’il ne put ni rompre ni plier. « Machalla, lui dis-je, tu n’as pas de force ; » et je passai les bâtons à un autre, qui ne réussit pas davantage. Alors un murmure général s’élevant dans l’assemblée :

« Qui donc pourrait briser une telle masse ? » s’écrièrent-ils d’un commun accord.

« — Je vous prends par vos paroles, » répondis-je ; et, dans le langage le plus énergique, je leur fis l’application de l’apologue, ajoutant que j’avais tant souffert de les voir