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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/174

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buscade de coupe-jarrets du général. Pour moi, ce n’est point pour établir deux chambres que j’ai pris le premier la cocarde tricolore ! »


X

Tel était le ton général de la presse ; tel était l’inépuisable rire que ce jeune homme semait, comme l’Aristophane d’un peuple irrité. Il l’accoutumait à bafouer même la majesté, le malheur, la beauté. Un jour vint où il eut besoin, pour lui-même et pour la jeune et belle femme qu’il adorait, de cette pitié qu’il avait détruite dans le peuple. Il n’y trouva que le rire brutal de la multitude, et il mourut, triste pour la première fois.

Le peuple, dont toute la politique est de sentiment, ne comprenait rien aux pensées des hommes d’État de l’Assemblée, qui lui imposaient ce roi fugitif, par respect pour une royauté abstraite. La modération de Barnave et des Lameth lui sembla une complicité. Les cris de trahison retentirent dans tous ses rassemblements. Le décret de l’Assemblée fut le signal d’une fermentation croissante qui se révélait, depuis le 13 juillet, par des attroupements, des imprécations ou des menaces. Des masses d’ouvriers sortis des ateliers se répandirent sur les places publiques, et demandèrent du pain à la municipalité. La commune, pour les apaiser, leur vota des distributions et des subsides. Bailly, maire de Paris, les harangua et leur ouvrit des tra-