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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/256

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accomplir avec et souvent malgré un parlement. Il fit violence à l’opinion. Il fut le despote de la constitution, si on ose associer ces deux mots qui peignent seuls son omnipotence légale. La lutte contre la Révolution française fut l’acte continu de ses vingt-cinq ans de vie ministérielle. Il se créa le rôle d’antagoniste de la France, et il mourut vaincu.

Cependant ce n’était pas la Révolution qu’il haïssait, c’était la France ; et dans la France, ce qu’il haïssait le plus, ce n’était pas la liberté, car il était homme au cœur libre, c’était la destruction de cet équilibre européen, qui, une fois détruit, laissait l’Angleterre isolée dans son Océan. À ce moment, l’Angleterre en ressentiment avec l’Amérique, en guerre avec les Indes, en froideur avec l’Espagne, en haine sourde avec la Russie, n’avait sur le continent que la Prusse et le stathouder. L’observation et la temporisation étaient une nécessité de sa politique.


V

L’Espagne, énervée par le gouvernement de Philippe V, avait repris quelque vitalité intérieure et quelque dignité extérieure pendant le long règne de Charles III. Campomanès, Florida Blanca, le comte d’Aranda, ses ministres, avaient lutté contre la superstition, cette seconde nature des Espagnols. Un coup d’État médité en silence, et exécuté comme une conspiration par la cour, avait chassé du royaume les jésuites, qui régnaient sous le nom des rois.