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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/278

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sujets révoltés qui tenait son souverain captif. Les actes les plus libres du roi leur étaient suspects. Sous les paroles constitutionnelles, ils croyaient, entendaient d’autres paroles toutes contraires. Les ministres de Louis XVI n’étaient que ses geôliers. De secrètes intelligences existaient entre ces gentilshommes et le roi. Des conciliabules intimes se tenaient dans les appartements écartés des Tuileries. Le roi tantôt encourageait, tantôt défendait l’émigration. Ses ordres variaient avec les jours et les circonstances : tantôt constitutionnels et patriotiques, quand il espérait, de bonne foi, pouvoir établir et modérer la constitution au dedans ; tantôt désespérés et coupables, quand le salut de la reine et de ses enfants ne lui paraissait plus pouvoir venir que de l’étranger. Pendant qu’il écrivait par la main de son ministre des affaires étrangères, à ses frères émigrés et au prince de Condé, des lettres officielles pour les rappeler à lui et leur représenter le devoir de tout citoyen envers sa patrie, le baron de Breteuil, son ministre confidentiel auprès des puissances, transmettait au roi de Prusse des lettres où respirait la pensée secrète du roi. La lettre suivante au roi de Prusse, datée du 3 décembre 1790, retrouvée dans les archives de la chancellerie de Berlin, ne laisse aucun doute sur cette double diplomatie du malheureux monarque. Louis XVI écrivait :


« Monsieur mon frère,

« J’ai appris par M. de Moustier l’intérêt que Votre Majesté avait témoigné non-seulement pour ma personne, mais pour le bien de mon royaume. Les dispositions de Votre Majesté à m’en donner des témoignages dans tous les cas où cet intérêt peut être utile pour le bien de mon