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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/324

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s’arrêtaient qu’au pied du trône. Le roi tremblait de les voir éclater un jour sur sa propre tête.

D’un autre côté, il sentait que la Révolution ne lui pardonnerait pas de la sacrifier à ses scrupules religieux. Placé ainsi entre les menaces du ciel et les menaces de son peuple, il ajournait de tous ses efforts les condamnations de Rome ou les résolutions de l’Assemblée. L’Assemblée constituante avait compris cette anxiété de la conscience du roi et les dangers de la persécution. Elle avait donné du temps au roi et de la longanimité aux consciences ; elle n’avait pas mis la main dans la foi du simple fidèle. Chacun était libre de prier avec le prêtre de son choix. Le roi avait usé le premier de cette liberté, et il n’avait point ouvert la chapelle des Tuileries au culte constitutionnel. Le choix de son confesseur indiquait assez le choix de sa conscience. L’homme protestait en lui contre les nécessités politiques que subissait le roi. Les Girondins voulaient le contraindre à se prononcer. S’il leur cédait, il perdait de sa dignité ; s’il leur résistait, il perdait les derniers restes de sa popularité. Le contraindre à se décider était un bénéfice pour les Girondins.

La passion publique servait leurs desseins. Les troubles religieux commencèrent à prendre un caractère politique. Dans l’ancienne Bretagne, les prêtres assermentés devinrent l’objet de l’horreur du peuple. Leurs prières passèrent pour des malédictions. On fuyait leur contact. Les prêtres réfractaires retenaient tout leur troupeau. On voyait des attroupements de plusieurs milliers d’âmes suivre, le dimanche, leur ancien pasteur, et aller chercher dans des chapelles situées à deux ou trois lieues des habitations, ou dans des ermitages reculés, des sanctuaires qui ne fussent pas souillés par les cérémonies du culte constitutionnel. À Caen, le sang