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Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 9.djvu/39

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Louis XVIII, avaient donné l’impulsion aux innovations les plus hardies. Ils avaient emprunté chacun leur crédit de quelques heures à des principes qu’il était plus facile de poser que de modérer ; la plupart de ces crédits avaient disparu. Aussitôt que ces théoriciens de la révolution spéculative s’étaient aperçus que le torrent les emportait, ils avaient essayé de remonter le courant, ou ils étaient sortis de son lit : les uns s’étaient rangés de nouveau autour du trône, les autres avaient émigré après les journées des 5 et 6 octobre. Quelques-uns, les plus fermes, restaient à leur place dans l’Assemblée nationale ; ils combattaient sans espoir, mais glorieusement, pour une cause perdue ; ils s’efforçaient de maintenir au moins un pouvoir monarchique, et abandonnaient au peuple, sans les lui disputer, les dépouilles de la noblesse et de l’Église. De ce nombre étaient Cazalès, l’abbé Maury, Malouet et Clermont-Tonnerre. C’étaient les hommes remarquables de ce parti mourant.

Clermont-Tonnerre et Malouet étaient plutôt des hommes d’État que des orateurs ; leur parole sûre et réfléchie n’impressionnait que la raison. Ils cherchaient l’équilibre entre la liberté et la monarchie, et croyaient l’avoir trouvé dans le système anglais des deux chambres. Les modérés des deux partis écoutaient avec respect leur voix ; comme tous les demi-partis et les demi-talents, ils n’excitaient ni haine ni colère ; mais les événements ne les écoutaient pas, et marchaient, en les écartant, vers des résultats plus absolus. Maury et Cazalès, moins philosophes, étaient les deux athlètes du côté droit ; leur nature était différente, leur puissance oratoire presque égale. Maury représentait le clergé, dont il était membre, Cazalès la noblesse, dont il