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Page:Lampryllos - La Mystification fatale, 1883.djvu/110

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midables et supérieurs en nombre, qui valent les plus beaux épisodes dont se glorifient en ce genre les races germaniques et latines. Nicéphore Phocas et Jean Zimiscés n’ont rien à envier à Charles Martel, Basile Ier à Charlemagne, Basile II à Othon le Grand. Comme culture, comme mouvement intellectuel et comme génie des arts, la Constantinople des Comnènes peut marcher de pair avec la France des XIIme et XIIIme siècles. Et si l’on a singulièrement exagéré le rôle des fugitifs de 1453, qui ne fut que secondaire, la venue des grands lettrés constantinopolitains, de Bessarion, de Gennadios, de Gémiste Pléthon, de Marc d’Éphèse, à Florence, comme représentants de l’Église grecque au concile, les relations qui s’établirent alors entre eux et les savants italiens, furent une véritable illumination pour l’Italie ; c’est à ce moment que la Grèce antique fut révélée à l’Occident, et c’est de là qu’on doit faire dater la renaissance des lettres. »

Voilà ce que l’on commence à reconnaître aujourd’hui et pourquoi l’on rend maintenant à l’empire Byzantin la justice que mérite son rôle de premier ordre dans l’histoire générale de l’Europe et de la civilisation. C’est aussi ce qui permet de comprendre comment l’hellénisme byzantin du VIII au X siècle, sut conquérir à sa langue, à ses mœurs, à sa religion, à son génie, l’Italie méridionale, et en particulier la Calabre, aussi complétement que l’hellénisme classique l’avait fait quinze siècles auparavant. Ce fait capital de l’hellénisation absolue d’un pays longtemps latin, devait demeurer lettre close, et même être complétement méconnu, tant que l’on vivait sur les préjugés d’autrefois à l’égard du byzantinisme.

Une théorie bizarre s’était, en effet, formée alors pour expliquer, en dehors de toute influence byzantine, l’origine de l’hellénisme de l’Italie méridionale du moyen âge, et même des populations qui parlent encore aujourd’hui le romaïque dans ces contrées, à Bova dans la Calabre, à Carigliane, Mortane, Calimera et dans nombre d’autres villages de la Terre d’Otrante. Cette théorie a eu sa période de succès, et elle compte encore en Italie de nombreux partisans ; mais l’on s’étonne qu’elle ait pu être adoptée par un philologue et un historien de la valeur de Niebuhr. Pour elle, cet hellénisme italien n’aurait rien à faire avec la méprisable imbécillité byzantine, dont l’Italie méridionale n’aurait supporté le joug qu’en frémissant et en cherchant à le secouer à tout prix, comme un servage étranger. Il