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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/128

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soi ; la philosophie de la nature retomba dans cette illusion. Kant seul s’est placé au point de vue tranché et parfaitement clair, d’après lequel nous ne savons des choses en soi que ce que précisément Feuerbach a négligé : nous sommes forcés de les présupposer comme une conséquence nécessaire de notre esprit, c’est-à-dire que la connaissance humaine ne représente qu’un îlot dans l’immense océan de toute connaissance possible.

Feuerbach et ses adhérents retombent sans cesse dans l’hégelianisme transcendant, précisément parce qu’ils ne font pas attention à ce point. Quand on étudie le « sensible » de Feuerbach, on a souvent de la peine à penser à l’œil et à l’oreille et plus encore à l’emploi de ces organes dans les sciences exactes. Son sensible est une forme nouvelle de la pensée absolue, qui fait entièrement abstraction de l’expérience positive. Si néanmoins il exerça une si grande influence précisément sur quelques naturalistes, on peut expliquer ce fait non par la nature des sciences empiriques, mais par l’effet que la philosophie de la nature produisit sur la jeune Allemagne.

Examinons un instant les souffrances qui suivirent la naissance de l’esprit absolu chez Moleschott !

Dans sa Circulation de la vie, cet habile écrivain s’étend aussi sur les sources de la connaissance chez l’homme. Après un éloge très-surprenant d’Aristote et un passage relatif à « Kant », dans lequel Moleschott combat un fantôme de ce nom à l’aide de thèses, que le véritable Kant pourrait accepter sans nuire à son système, suit le passage que nous avons en vue. Il commence avec une clarté exemplaire, pour se transformer insensiblement en un brouillard métaphysique, qui même dans notre brumeuse patrie chercherait son pareil. Fidèle à notre système, nous mettons en relief ces épaisses obscurités par des lettres italiques.

« Tous les faits, l’observation d’une fleur, d’un scarabée et l’étude des qualités de l’homme, que sont-ils, sinon des