Aller au contenu

Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même se demander si, entre tous, il ne doit pas occuper la première place. Il naquit en 1711 à Édimbourg, d’une famille noble d’Écosse. Dès l’année 1738, parut son ouvrage sur la nature humaine, écrit durant son séjour en France, dans les complets loisirs qu’il consacrait à la science. Ce ne fut que quatorze ans plus tard qu’il se voua à ces études historiques, auxquelles il doit une si grande partie de sa réputation. Après des fonctions diverses, il finit par devenir secrétaire d’ambassade à Paris, puis sous-secrétaire d’État. Nous autres Allemands, qui, par une association d’idées involontaire, nous figurons toujours un philosophe assis dans une chaire professorale, l’index levé, nous sommes nécessairement étonnés que, parmi les philosophes anglais, il y ait tant d’hommes d’État, ou plutôt, fait encore plus remarquable, qu’en Angleterre les hommes d’État soient parfois des philosophes.

Hume, dans ses opinions, se rapprocha du matérialisme autant qu’un sceptique aussi décidé peut le faire. Il se plaça sur le terrain préparé par Hobbes et Locke. Il expliquait occasionnellement la naissance de l’erreur, sans d’ailleurs attacher une grande importance à cette hypothèse, par la fausse direction que suivraient les idées dans le cerveau, où il les croyait toutes localisées. Pour ce point faible du matérialisme, que les matérialistes eux-mêmes ne savent pas défendre, Hume a trouvé un rempart suffisant. Tout en accordant qu’il est impossible d’expliquer comment le mouvement à travers l’espace aboutit à l’idée et à la pensée, il fait remarquer qu’un tel mystère n’enveloppe pas ce seul problème. Il montre qu’il y a exactement la même contradiction dans toute relation de cause à effet. « Suspendez un corps du poids d’une livre à l’extrémité d’un levier et un autre corps du même poids à l’autre extrémité, vous trouverez dans ces corps aussi peu une cause pour le mouvement, qui dépend de leur distance au centre, que vous en trouvez pour l’idée et la pensée (5). »