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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/230

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stériles spéculation son de trancher avec le glaive de l’illusion ce nœud gordien, nous aimons mieux nous en tenir à l’intuition des choses telles qu’elles sont et nous contenter, pour parler comme le poëte, du « miracle qui est devant nous ». Car, une explication satisfaisante nous étant refusée dans une voie, nous ne pouvons nous résoudre à fermer les yeux sur les défectuosités d’une autre voie, par l’unique motif qu’une troisième semble impossible ; et nous avons assez de résignation pour admettre la pensée que finalement le but de toute science pourrait bien être, non de comprendre l’essence des choses, mais de faire comprendre que cette essence est incompréhensible. Ainsi la conclusion finale de la mathématique a été, non de trouver la quadrature du cercle, mais de démontrer qu’il est impossible de la trouver ; de la mécanique, non de réaliser le mouvement perpétuel, mais de prouver qu’il est impossible de le réaliser. » Nous ajouterons « de la philosophie, non de recueillir des notions de métaphysique, mais de montrer que nous ne pouvons sortir de la sphère de l’expérience ».

Ainsi, par le progrès de la science, nous acquérons toujours une connaissance plus sûre des rapports des choses entre elles et une connaissance de plus en plus incertaine du sujet de ces rapports. Tout reste clair et intelligible, tant que nous pouvons nous en tenir aux corps, tels qu’ils apparaissent immédiatement à nos sens ou tant que nous pouvons nous représenter leurs éléments hypothétiques, d’après l’analogie de ce qui tombe sous les sens ; mais la théorie dépasse toujours cette limite, et, tout en donnant une explication scientifique de ce que nous avons devant nous, tout en poussant notre intuition de l’enchaînement des choses assez loin pour pouvoir prédire les phénomènes, nous nous laissons engager dans la voie d’une analyse, qui conduit à l’infini, non moins bien que le font nos représentations de temps et d’espace.

Nous ne devons donc pas nous étonner si nos physiciens