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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/294

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forme et de couleur, à leur entourage ou même à d’autres organismes (70), répandue surtout dans le monde des insectes et donnant lieu aux erreurs les plus étranges.

D’après le principe général, cette décevante imitation de formes étrangères semble parfaitement s’adapter à la sélection naturelle, car elle est toujours une protection de l’animal en question contre ceux qui le poursuivent. On peut donc facilement admettre que des individus ayant subi fortuitement une modification dans ce sens tutélaire, ont dû se conserver plus longtemps et exercer une plus grande influence que les autres sur la propagation de leur espèce. Cela étant une fois accordé, l’adaptation à la forme et à la couleur protectrices dut nécessairement progresser sans cesse. Mais ici se présente la grande difficulté il est très-malaisé d’expliquer la première variation dans le sens protecteur. Un adversaire de Darwin, M. Bennett (71), a mis en relief que la ressemblance de maints insectes avec le sol sur lequel ils se tiennent, avec la couleur d’écorce d’arbre desséchée, de feuilles tombées ou avec les teintes éclatantes des fleurs, sur lesquelles ils se posent habituellement, se réalise à travers une si longue série de traits et de dessins trompeurs, qu’on ne doit pas admettre l’apparition subite d’un pareil changement, et cela d’autant moins que les espèces les plus rapprochées ont souvent un extérieur complètement différent. M. Bennett ajoute que l’apparition fortuite d’une partie de ce nouveau dessin ne pouvait être d’aucune utilité pour l’animal, parce que ce changement n’aurait certainement pas trompé ses persécuteurs. Mais jusqu’à ce que, par un simple accident de variation, qui, d’après la nature de la chose, peut avec une égale facilité se produire dans telle ou telle direction, toutes les teintes et modifications de forme se combinent au point que l’illusion soit complète, il faut une telle accumulation de hasards que le calcul des probabilités tomberait dans des nombres infinis. Il faudrait donc aussi corrélativement admettre des espaces