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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/430

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Aussi la psychologie d’association fait-elle d’emblée une exception dans ses efforts pour l’établissement d’une régulière succession de représentations. Les perceptions des sens, dans la plus large acception du mot, viennent du dehors, sans que l’on demande en outre comment cela est possible. Elles sont, considérées au point de vue de l’âme, pour ainsi dire, des créatures tirées du néant, des agents nouveaux surgissant d’une manière continue, qui modifient notablement l’ensemble du monde des représentations, mais qui, dès le moment de leur apparition, se soumettent aux lois de l’association. La difficulté renfermée dans cette hypothèse fut aisément voilée en Angleterre par le matérialisme traditionnel provenant de Hartley et de Priestley. Les successeurs, qui repoussèrent les conséquences de ce matérialisme, conservèrent néanmoins la commodité de son mode d’explication, sans penser qu’un nouveau point de vue entraîne à sa suite de nouveaux problèmes.

Stuart Mill a traité en détail, dans sa Logique (livre VI, chap. iv), la question ici effleurée. Il s’attaque à Comte qui, avec une très-grande netteté, déclare que les états de l’esprit n’ont aucune régularité immanente, mais sont provoqués simplement par les états du corps. À ces derniers appartient la régularité ; si, chez les premiers, il se manifeste de l’uniformité dans la série des phénomènes, cette uniformité n’est que dérivée et non primitive ; aussi n’est-elle point l’objet d’une science possible. En un mot : la psychologie ne se comprend que comme portion de la physiologie.

À l’encontre de cette théorie éminemment matérialiste, Mill cherche à défendre les droits de la psychologie. Il abandonne, sans hésitation, tout le domaine des perceptions sensibles et croit pouvoir sauver ainsi l’autonomie du savoir relatif à la pensée et aux mouvements de l’âme. Il abandonne les perceptions des sens à la physiologie. Quant aux autres phénomènes psychiques, la physiologie ne sait encore nous en expliquer que très-peu de chose, pour ne pas dire