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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/12

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BOILEAU.

derrière Montmartre, en bas de la colline. En ce temps-là, dès qu’on avait franchi la porte Montmartre, on se trouvait en pleine campagne, au milieu des courtilles et des jardins, devant le paysage que Regnard apercevait de ses fenêtres :

.….Les yeux satisfaits
S’y promènent ou loin sur de vastes marais ;
C’est là qu’en mille endroits laissant errer ma vue,
Je vois croître à plaisir l’oseille et la laitue ;
C’est là que dans son temps des moissons d’artichauts
Du jardinier actif secondent les travaux,
Et que de champignons une couche voisine
Ne fait, quand il me plaît, qu’un saut dans ma cuisine.

Pour rivière, le grand égout qui coulait à ciel ouvert ; puis la butte Montmartre, avec « les antres profonds de ses plâtrières » et ses trente moulins ; la plaine Saint-Denis, plate et maigre. Voilà sous quel aspect la nature apparut à l’enfant qui devait être un poète, quand on le menait promener à la vigne paternelle. Faut-il s’étonner que cette jeune âme ne se soit pas ouverte au charme des choses champêtres ? Cependant il n’ignora point tout à fait

Les forêts, les eaux, les prairies,
Mères des douces rêveries.


Gilles Boileau passait le temps des vacances dans une maison qu’il avait à Crosne, près de Villeneuve-Saint-Georges, dans la vallée que domine Montgeron ; le pré qui était au bout du jardin donna, paraît-il, au petit Nicolas ce nom de Despréaux sous lequel ses contemporains le connurent. S’il n’est pas né