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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/122

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BOILEAU.

De là ce parti pris en faveur de la mythologie païenne, qui lui faisait ridiculement évoquer des divinités d’opéra dans le récit d’un événement tel que le passage du Rhin par une armée française. De là la nécessité où il nous réduit de nous ranger une fois du côté de Desmarets et de Perrault, précurseurs ici de Chateaubriand et de la poésie moderne, quand il s’obstine à nier que le christianisme puisse avoir place dans un poème épique et en accroître la beauté. Condamnait-il donc Polyeucte ? ou bien, s’il admettait une tragédie chrétienne, pourquoi pas aussi une épopée chrétienne ? Boileau cède à une illusion. Il ne connaît pas d’épopée chrétienne qui soit passable : même dans le Tasse, il trouve bien du clinquant. Il raisonne comme si ce qui n’a jamais été dans la nature n’était pas conforme à la nature, et ne pouvait jamais y être, qu’à titre de monstruosité. Au contraire, la mythologie est dans Homère et dans Virgile : donc la nature que l’épopée imite, implique la mythologie. La mythologie est vraie. Mais comme il serait difficile à un moderne, à un chrétien, de maintenir cette assertion au sens littéral du mot, Boileau recourt pour la justifier à une conception très fausse et très en vogue alors de l’épopée : l’épopée est un poème allégorique, et la mythologie est vraie, comme forme d’art exprimant l’abstrait par le concret, selon de certaines conventions. La Fable est un répertoire de figures et d’images dont le sens est fixé, et qu’on emploie pour éviter la sécheresse de l’expression propre. Dieux,