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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/121

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

dans les salons. Rien de plus : ni peuple, ni provinciaux, ni paysans. Ni même, si on presse le sens des mots, ces relations de famille, ces affections privées, qui sont en dehors de la conversation mondaine, et n’y peuvent éclater sans indiscrétion ou scandale. La comédie, enfin, n’imitera que les mœurs de cour et de salon, ce qu’il y a de plus convenu, extérieur et accidentel, ce qu’il y a de moins humain dans l’homme. Ici, évidemment, le poète a érigé son goût de Parisien et d’homme du monde en lois générales de la raison : il a fixé les bornes de la nature qui peut être objet d’imitation, selon les préjugés d’un siècle mondain et raffiné, dans lequel il se trouvait vivre. Mais comment peut-il trouver son idéal réalisé dans Térence, qui n’a point songé à étudier la cour ni la ville ?

D’autres fois, à force d’étudier les Grecs et les Latins, il se familiarise avec les formes particulières que certaines circonstances et le caractère de la civilisation antique ont données aux sentiments de l’âme et à leur expression littéraire. Il attribue une valeur absolue à des choses toutes relatives, et s’imagine trop facilement que la vérité et le naturel d’Athènes seront aussi vérité et naturel à Paris. De là, chez ce naturaliste convaincu, d’étranges transactions et des contradictions fâcheuses : de là, sa définition de l’ode qui « entretient commerce avec les dieux », ou qui « ouvre la barrière aux athlètes dans Pise » : à quelle nature, pour un homme du xviie siècle, peut s’attacher ici l’imitation poétique ?