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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/140

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BOILEAU.

donner un prix infini aux choses : avis à ceux qui croient que le sujet est tout. Puis il y a une hiérarchie des genres, mais chaque genre a son idéal, sa perfection propre, absolue en soi ; et pour juger d’un ouvrage, il ne faut pas le comparer à d’autres de genre différent, mais le rapporter seulement au type déterminé par la définition du genre. En sorte qu’un sonnet parfait n’a rien à envier à une excellente épopée ; ce sont deux choses absolument et également parfaites, et pourvues d’une « beauté suprême ». Celui qui a fait « un sonnet achevé » ne pouvait rien faire de plus en fait de sonnet, comme, selon Descartes, un enfant qui a fait une addition dans les règles peut être assuré d’avoir trouvé tout ce que l’esprit humain était capable de trouver relativement à la somme qu’il cherchait.

Mais tandis que dans la poésie antique, en Grèce surtout, les genres se définissaient essentiellement par les mètres qui les constituaient, chez nous ils se distinguent surtout par leurs objets et leurs effets. Boileau ne semble pas s’apercevoir qu’il y a là deux principes très différents de classification des genres, et que des poèmes à forme fixe tels que la ballade et le sonnet, qu’on est obligé de caractériser à la mode antique, par leur forme métrique, et qui peuvent recevoir toutes les idées et tous les sentiments de tout ordre, ne sont pas du tout des genres comparables à l’élégie ou à la tragédie, ni à tous les autres, où, sous-entendant les conditions particulières de versification et de disposition métri-