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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/164

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BOILEAU.

réaliser la perfection dont il donnait la première formule.

Mais, de plus, Boileau et Racine, et La Fontaine, et Molière étaient des artistes : ce que n’étaient ni les Chapelain, ni les Scudéry, ni les Desmarets, ni les Cotin, ni tous les prétentieux rédacteurs d’emphatiques épopées, ni tous les ingénieux rimeurs de petits vers, ni tous les pédants qui estimaient que l’usage des règles, par une vertu secrète, suffit sans la matière et sans le génie à la perfection des œuvres, ni enfin tous les inspirés qui écrivaient en courant, sans réflexion et sans retouches, au hasard de leur fantaisie. Au contraire Racine, Molière, La Fontaine ont tous dans l’esprit un idéal d’art, un type formel où la nature s’exprime dans son énergie et son caractère, mais de plus se revêt d’une absolue beauté. Ils prennent les lois et les règles comme des conditions données à leur activité, comme une sorte de cahier des charges imposé à l’artiste qui entreprend de faire une œuvre, tout au plus comme une méthode qui permet d’obtenir économiquement et sûrement la plus grande somme de perfection. Et pour Boileau, les règles ne sont pas autre chose : des moyens, non le but. Par là encore, sa critique est adéquate à l’inspiration des grands écrivains.

D’où donc a-t-il tiré cette théorie originale et féconde ? Qui lui enseigna que la poésie était un art, non pas au sens où la rhétorique aussi est un art, ni comme les arts mécaniques, mais un des beaux-arts ?