Aller au contenu

Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/171

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
167
LA CRITIQUE DE BOILEAU.

l’abondance de ses idées une totale absence de sentiment esthétique ; enfin un chevalier, sorte de Turlupin de la critique, plus sot que spirituel, n’en déplaise à Perrault, qui l’a chargé d’avancer toutes les énormités qu’il n’osait faire endosser à son abbé.

Perrault, en fervent cartésien, prétendait maintenir les droits de la raison, indépendante en chacun, précisément parce qu’elle est commune à tous. Il annonçait l’intention de passer en revue tous les arts, toutes les sciences et tous les genres littéraires : architecture, sculpture, peinture, astronomie, géographie, navigation, physique, chimie, mécanique, éloquence, poésie ; et dresser le bilan des progrès de l’esprit humain. Il y avait là en germe l’idée d’une histoire générale de la civilisation, et d’une histoire particulière de chaque ordre de connaissances. Perrault n’était pas de taille à la réaliser. Il n’y songea même pas ; il se contenta d’effleurer tout, en amateur, et de jeter en avant sur tout sujet ses vues personnelles, plus content d’en avoir à montrer que soucieux d’en vérifier la justesse. Il fit parler spirituellement et même raisonnablement son abbé sur la technique des beaux-arts ; il y distingua des beautés universelles et des beautés relatives ; il fit voir que les formes, le style et le goût sont choses infiniment variables, qui enveloppent et déguisent certaines conditions générales et permanentes. Mais en ne regardant que la technique, il ne s’apercevait pas que ni l’évolution d’un art ne