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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/203

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L’INFLUENCE DE BOILEAU.

poétique : mais qu’est-ce que ces règles, séparées des principes qui leur donnent sens et vertu, abstraction faite du naturalisme et de la notion d’art ? Au lieu de les employer comme moyens d’où résulte la forme expressive et belle, l’idée d’agrément et de beauté s’attache à leur observance même ; un sec formalisme s’impose à la littérature, par une méprise analogue à celle de certains dévots qui croient gagner le ciel par des formules verbales et des actes physiques, sans l’élan du cœur et sans l’amour. Le monde interprète les règles selon l’esprit mondain : il y voit des « convenances » dont il n’y a pas à demander la raison, et qui sont souveraines parce qu’elles sont. Le monde fait ce qui se fait : voilà la loi du monde, et voilà pourquoi il faut faire une tragédie comme il est établi qu’on fait les tragédies. L’exactitude formelle tient lieu de tout, et rien n’en saurait dispenser. Car si les règles sont des moyens, Boileau peut encore concéder qu’on y renonce pour mieux atteindre au but de l’art : mais aujourd’hui que le but, c’est précisément l’emploi des règles, il ne peut plus y avoir d’exception ni de privilège pour personne.

Enfin on parle beaucoup de Boileau au xviiie siècle et on l’appelle le « législateur du Parnasse ». Sous ce respect de convention, on le suit à peu près autant que les anciens. J’ai beau me tourner de tous les côtés, j’ai peine à découvrir rien que je doive nécessairement attribuer à l’influence unique ou prépondérante de Boileau. Ce n’est pas de lui