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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/202

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BOILEAU.

qu’un vers, et la très particulière jouissance qui résulte des sons et des rythmes.

Le xviiie siècle n’aperçut pas davantage le naturalisme de Boileau : il ne conçut pas d’autre naturel que cette aisance élégante et très étudiée où consiste la perfection de la distinction mondaine. Les questions de goût et de bienséance prennent le pas sur la vérité des choses, et la communication est si bien fermée entre la réalité vivante et l’esprit français, que les formes nouvelles de l’art conçues théoriquement en vue d’une vérité plus grande n’arrivent pas à se réaliser dans des œuvres moins conventionnelles que celles qu’il s’agit de remplacer : je parle de la comédie larmoyante et du drame, qui prétendent se substituer à la tragédie. La recherche de la vraisemblance supprime celle de la vérité, et tandis que le vraisemblable pour Boileau était l’introducteur du vrai, et consistait à saisir le rapport de l’objet à l’esprit, il devient au xviiie siècle le pire ennemi de la nature, qu’il déforme quand il ne l’exclut pas. Le respect des opinions reçues, et la confiance en l’infaillibilité de la raison du siècle, font qu’on ne croit plus utile d’aller au delà de l’idée que tout le monde se forme de la nature, jusqu’à la nature elle-même. De là la pauvreté, la banalité, la psychologie maigre ou fausse des tragédies, comédies et romans, qui contraste si singulièrement avec la hardiesse de la raison spéculative.

À vrai dire, on parle des règles, et ces règles sont, dans le particulier, celles que donne l’Art