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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/40

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BOILEAU.

téméraire et frondeuse. Il se croyait chrétien parce qu’il allait à la messe, et orthodoxe parce qu’il professait de croire en gros ce que croit l’Église, en méprisant comme chicanes toute cette théologie qui limite le dogme et détermine l’hérésie. Au fond, sous le chrétien sommeillait le déiste. Dieu était nécessaire à sa raison ; et c’était le Dieu de sa raison qu’il adorait dans les Trois personnes du Dieu catholique. Moins détaché que Molière, moins hostile que Voltaire, son acte de foi est un acte de sens propre, indépendant et réfléchi. Boileau est tout simplement un cartésien, de ce premier cartésianisme, encore inconscient de sa nature intime et qui se flattait de donner un appui à la foi qu’il était fait pour ruiner. Bossuet, avec cet infaillible coup d’œil qui saisissait les conséquences lointaines dans les principes cachés de toutes les doctrines, ne prenait point le change. S’il louait l’« hymne inspiré » de l’amour de Dieu, le tour de raillerie du satirique l’inquiétait, et les condamnations sévères qu’il portait sur certaines satires nous montrent qu’il avait pressenti chez Despréaux une raison déjà émancipée : comme Descartes, ce n’était là pour lui qu’un allié d’occasion, capable d’être l’ennemi du lendemain.

Nous connaissons mieux les dernières années de Boileau que sa jeunesse et sa maturité, grâce à sa correspondance : de 1687 à 1699 s’étend la correspondance avec Racine, et précisément en 1699, quand celle-ci cesse, nous voyons s’en établir une autre avec Brossette, qui nous conduit jusqu’à la