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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/51

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LA POÉSIE DE BOILEAU.

rime autrement que M. de Banville et tous nos Parnassiens, qui en font l’élément constitutif du vers, et s’efforcent de la faire porter sur les mots caractéristiques de la phrase ? Voyez sa pratique : jamais il ne rime négligemment, faiblement, lâchement. Jamais il ne rime au petit bonheur, par à peu près, à coups d’épithètes incolores, « à la Voltaire ». Dès sa première satire, pièce assez médiocre, il trouve la rime pleine, riche, curieuse même. Souvent les deux mots qui riment, presque toujours l’un des deux, sont significatifs ; à l’ordinaire, la fameuse loi de la consonne d’appui est observée. Le poète poursuit même évidemment les rimes imprévues et singulières : axe et parallaxe, embryon et dissection, coco et Cuzco. Nous en avons vu bien d’autres : mais pour le temps, ce n’étaient pas là des mots familiers aux poètes en quête de rimes.

Assurément Boileau coupe ses vers à l’hémistiche, et pour lui, comme pour tous ses contemporains, le distique est la forme fondamentale, quand il écrit en alexandrins. Il est bien éloigné des audaces même de Chénier, qui est encore pourtant un classique. Et cependant « ce grand niais d’alexandrin » que V. Hugo n’avait pas encore disloqué, n’est pas si raide ni si compassé chez lui qu’on veut bien le dire. Césures déplacées, enjambements alors hardis, tous ces moyens d’assouplir le vers et d’en tirer des effets variés lui sont connus, et il les emploie. C’est ainsi qu’il écrit :