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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Pernette, Lemerre.djvu/188

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LE LIVRE D’UN PÈRE.

Et rien ne l’arrachait à ses nobles études ;
Il donnait, intrépide à son double devoir,
Tout le jour au métier et la nuit au savoir.
Dans l’âge où mollement j’assemblais quelques rimes,
Il scrutait la nature et ses secrets intimes,
Voulant suivre en son art, jusqu’au plus haut degré,
Son père, le savant qu’il avait adoré !
Car, s’oubliant, il fit deux parts de sa carrière ;
Ses aïeux, puis ses fils, eurent sa vie entière.
Jeune homme, il travaillait, docile à cette loi,
Pour sa mère, et vieillard, il travaillait pour moi.
Un jour, dans la vigueur de ses vertes années,
Du prix de ses efforts à peine couronnées,
Près de toucher au but, mûr pour les dignités,
Il dut choisir : l’honneur et les serments prêtés,
Obéis sur-le-champ, obéis avec joie,
Des succès, des honneurs lui fermèrent la voie…
Et pour penser demain ce qu’il pensait hier,
À son vieux roi fidèle, il resta pauvre et fier.
Tel fut l’homme de cœur, père de votre père ;
Vous porterez son nom dignement, je l’espère.
Si l’un de vous forfait au sang dont il est né,
Moi qui vous l’ai transmis, je serai condamné.