Aller au contenu

Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
RACINE.

chiffre des élèves de Port-Royal n’a jamais dépassé cinquante. Chaque maître n’avait pas plus de six élèves et s’efforçait d’adapter à la nature de chacun les principes communs de l’éducation. Dans les collèges, la crainte et la rivalité étaient les moyens d’obtenir l’obéissance et le travail ; aux Petites Écoles, les enfants étaient conduits par la charité et la douceur ; ils n’entendaient jamais parler de coups ni de verges ; le seul désir de mériter l’approbation de leurs maîtres les excitait à bien faire. Tandis que les collégiens affectaient une familiarité brutale, les élèves de Port-Royal étaient habitués à « se prévenir d’honneur les uns les autres » et à ne se tutoyer jamais. En tout, les solitaires s’efforçaient de reproduire l’image épurée de la maison paternelle.

Pour l’enseignement, Port-Royal renonçait aux routines pédantes et raisonnait toutes les études. Au lieu des procédés barbares sur lesquels l’Université vivait encore, il remontait directement aux sources. Il réduisait la grammaire et la logique à des principes simples et clairs ; il faisait connaître les textes par un commerce assidu. Le grec, après la grande ferveur des humanistes au siècle précédent, avait à peu près disparu des collèges ; Port-Royal en faisait pour ses élèves, au rapport de Wallon de Beaupuis, « le principal objet de leurs occupations pendant trois ou quatre années », et, de la sorte, il les introduisait « jusque dans le fond de la Grèce, par des routes qui n’étoient alors nullement connues ».

Une telle éducation et un tel enseignement s’accordaient de la plus heureuse manière avec la nature de Racine. Le jeune homme était tendre et délicat ;