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Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/36

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RACINE.

Molière, ils étaient des plus calmes. On souhaiterait même un peu moins d’indifférence dans ce passage fameux : « Monfleury a fait une requête contre Molière et l’a donnée au Roi. Il l’accuse d’avoir épousé la fille et d’avoir autrefois été l’amant de la mère. Mais Monfleury n’est point écouté à la cour. » Encore faut-il adoucir la citation.

Enfin, au début, la Thébaîde ne devait pas être jouée sur le théâtre de Molière, mais à l’Hôtel de Bourgogne. Craignant d’être retardé à l’Hôtel, le poète finit par la donner à la troupe de Molière. Est-il vraisemblable qu’il eût fait accepter sa pièce à l’Hôtel avant de l’avoir écrite, et peut-on admettre que Molière ait collaboré à une pièce qui n’était point pour son théâtre ?

La Thébaïde était représentée sur le théâtre du Palais-Royal, le 20 juin 1664. Avant cette date, un appel touchant était venu à Racine du côté de Port-Royal. Sa tante, la sœur Agnès de Sainte-Thècle, lui avait adressé cette mise en demeure :

Je vous écris dans l’amertume de mon cœur, et en versant des larmes que je voudrois pouvoir répandre en assez grande abondance devant Dieu pour obtenir de lui votre salut…⋅ J’ai appris avec douleur que vous fréquentiez plus que jamais des gens dont le nom est abominable à toutes les personnes qui ont tant soit peu de piété, et avec raison, puisqu’on leur interdit l’entrée de l’église et la communion des fidèles, même à la mort, à moins qu’ils ne se reconnaissent. Jugez donc, mon cher neveu, dans quel état je puis être, puisque vous n’ignorez pas la tendresse que j’ai toujours eue pour vous, et que je n’ai jamais rien désiré, sinon que vous fussiez tout à Dieu dans quelque emploi honnête. Je vous conjure donc, mon cher neveu, d’avoir pitié de votre âme, et de rentrer dans votre cœur, pour y considérer sérieusement dans quel abîme vous vous êtes jeté. Je sou-