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Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/46

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RACINE.

neille et Quinault, puis celle des deux antiquités, avec Euripide et Sénèque, enfin et surtout, pour une large mesure, la mode du temps. Il y avait peu de vérité humaine, peu d’originalité et aucun génie. Le mérite de ce début consistait dans une facilité harmonieuse dont Quinault offrait l’équivalent. La pièce eut un succès moyen ; qualités et défauts, elle n’offrait pas à l’admiration ou au blâme une prise suffisante. Elle obtint dix-neuf représentations, dont trois à la cour. Elle était dédiée au premier protecteur que le poète eût rencontré parmi les grands seigneurs, le duc de Saint-Aignan, grand amateur de lettres et organisateur des fameux Plaisirs de l’île enchantée, donnés à Versailles au mois de mai précédent. Dans l’épître dédicatoire, Racine constatait son succès, « quelques ennemis, disait-il, que je puisse avoir ». Ces ennemis vont bientôt être légion ; en attendant, leur hostilité était encore discrète, car elle n’a pas laissé de traces.

Avant de paraître devant le public, Alexandre le Grand avait fait l’objet d’une lecture partielle, fort goûtée, chez Mme du Plessis-Guénégaud, à l’hôtel de Nevers, devant un cercle où figuraient La Rochefoucauld, Pomponne, Mme de La Fayette, Mme de Sévigné et sa fille. La représentation eut lieu, le 4 décembre 1665, devant une assemblée qui comprenait Monsieur, frère du roi, et sa femme, Henriette d’Angleterre, le grand Condé et le duc d’Enghien, la princesse palatine, Anne de Gonzague. De tels spectateurs montrent quelle attente excitait la pièce. Parmi eux, plusieurs devinrent les protecteurs de Racine. Le succès fut grand, mais aussitôt de vives