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Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/55

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carrière théâtrale.

distrait, jamais poète, ni auteur, il songeoit moins à faire paroître son esprit, que l’esprit des personnes qu’il entretenoit. Il ne parloit point le ses ouvrages, et répondoit modestement à ceux qui lui en parloient : doux, tendre, insinuant et possédant le langage du cœur.

Ce portrait empiète sur l’avenir en nous montrant Racine à la cour et complètement formé. Mais, au moment où nous sommes arrivés, les traits physiques et moraux de cette nature devaient être tels que Louis Racine les indique, et le temps ne pouvait que les accentuer. Comme aussi cette beauté, qui résidait surtout dans la douceur et la régularité des lignes, n’avait guère à craindre de l’âge. Vers le temps où son père touchait à la cinquantaine, son fils aîné, Jean-Baptiste, l’a dessiné, avec quelque talent et une fidélité évidente, sur un exemplaire d’Horace que possède la Bibliothèque nationale. Les traits sont légèrement empâtés, mais la beauté reste la même. L’expression a gagné encore en noblesse ; l’œil surtout est admirable de calme et de profondeur.

Avec Andromaque, représentée au mois de novembre 1667, à l’Hôtel de Bourgogne, qui sera désormais son théâtre. Racine abordait vraiment l’antiquité grecque, car, à ce point de vue, la Thébaïde, et même Alexandre, ne comptent guère. Quelques vers d’Homère et de Virgile lui suffisaient pour la pénétrer. Il laissait de côté les deux tragédies d’Euripide, où figure la veuve d’Hector, car il voulait la montrer sous un autre aspect que le tragique grec. Ainsi son sujet lui appartenait tout entier, sauf les noms. En ressuscitant l’âme de la Grèce dans ce qu’elle eut de