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Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/78

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RACINE.

jamais homme, par la finesse de l’esprit et la délicatesse du goût, comme aussi par un talent de diction demeuré célèbre, fut merveilleusement doué pour l’éloquence académique, c’était Racine. Il le prouva plus tard, notamment en 1685, lorsqu’il reçut Thomas Corneille et rendit à la mémoire de Pierre l’admirable hommage que l’on sait. Cependant, son début lut des plus ternes : « Le remerciement de mon père, dit Louis Racine, fut fort simple et fort court, et il le prononça d’une voix si basse que M. Colbert n’en entendit rien, et que ses voisins même en entendirent à peine quelques mots. » Ce malheureux discours ne s’est pas retrouvé.

Le lendemain, 13 janvier, est la date probable de la première représentation de Mithridate. Plus encore que pour Bajazet, l’envie se trouva réduite au silence. Mme de Coulanges, écrivant à Mme de Sévigné, prenait en ces termes sa part de l’enthousiasme général : « Mithridate est une pièce charmante ; on y pleure, on y est dans une continuelle admiration ; on la voit trente fois, on la trouve plus belle la trentième que la première. » Le poète pouvait donc, une fois de plus, parler de sa pièce d’un ton uni. Toutefois, le reproche d’infidélité historique lui tenait à cœur, et il consacrait toute une préface à le réfuter : « Tout le monde, disait-il, reconnaîtra aisément que j’ai suivi l’histoire avec beaucoup de fidélité. » Et il rappelait en détail ses autorités.

À la cour, plusieurs représentations de Mithridate avaient lieu coup sur coup. Le compte rendu par le Mercure de celle du 9 mai, donnée à Saint-Cloud, chez Monsieur et Madame, recevant la dauphine