Page:Larroumet - Racine, 1922.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
94
RACINE.

Ce n’en était pas moins une terrible aventure. Ainsi, au bout de dix ans, le souvenir d’une liaison avec une comédienne pouvait avoir de telles conséquences ! La tourmente passée. Racine devait se tenir plus fermement que jamais à sa résolution de se renfermer dans ses devoirs de famille et de cour.

Qu’il ait été parfaitement heureux comme mari, on ne saurait en douter. Tout ce que l’on sait de son existence privée confirme le témoignage de Louis Racine : « Sa compagne sut, par son attachement à tous les devoirs de femme et de mère, et par son admirable piété, le captiver entièrement, faire la douceur du reste de sa vie, et lui tenir lieu de toutes les sociétés auxquelles il venoit de renoncer. » Le fils mentionne à ce sujet une correspondance où abondaient les « termes tendres » et où le poète communiquait à sa femme « ses pensées les plus secrètes », mais « que, sans doute pour lui obéir, elle ne conservoit pas ».

En effet, la correspondance aujourd’hui connue ne renferme qu’une de ces lettres, écrite après quinze ans de mariage (15 mai 1692), tandis que Racine accompagnait le roi au siège de Namur. Elle commence par employer le vous et ne contient que des nouvelles fort simples, simplement écrites et de celles qui peuvent intéresser un esprit simple. Mais, à la fin, la tendresse paraît, conjugale en même temps que paternelle : « Adieu, mon cher cœur ; embrasse nos enfants pour moi. Exhorte ton fils à bien étudier et à servir Dieu… Écris-moi souvent, ou lui. Adieu, encore un coup. »

Simple, Mme Racine l’était à un degré rare, et,