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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/158

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ennemis intérieurs. Dès lors ils ne songèrent plus qu’à marcher sur la capitale, sous les murs de laquelle ils arrivèrent les derniers jours de juin, avec moins de quatre-vingt-dix mille hommes ; démarche qui leur aurait été funeste et eût entraîné leur ruine totale, s’ils l’eussent hasardée devant Napoléon ; mais ce prince avait abdiqué !!! Les troupes de ligne qui se trouvaient à Paris, plus de six mille hommes des dépôts de la garde, les tirailleurs de la garde nationale, choisis dans le peuple de cette grande capitale, lui étaient tous dévoués ; il pouvait foudroyer les ennemis intérieurs !!!… Mais pour développer les motifs qui ont réglé sa conduite dans cette occasion si importante, et qui a en de si funestes conséquences pour lui et pour la France, il faut reprendre le récit de plus loin, etc., etc.

Première observation. – « On a reproché à l’Empereur : 1° de s’être démis de la dictature au moment où la France avait le plus grand besoin d’un dictateur ; 2° d’avoir changé les constitutions de l’empire dans un moment où il ne fallait songer qu’à le préserver de l’invasion ; 3° d’avoir souffert que l’on alarmât les Vendéens, qui d’abord avaient refusé de prendre les armes contre le régime impérial ; 4° d’avoir réuni les Chambres lorsqu’il suffisait de réunir les armées ; 5° d’avoir abdiqué et laissé la France à la merci d’une assemblée divisée et sans expérience : car enfin, s’il est vrai qu’il fût impossible au prince de sauver la patrie sans la confiance de la nation, il ne l’est pas moins que la nation, dans ces circonstances critiques, ne pouvait sauver ni son honneur ni son indépendance, sans Napoléon. »

Nous ne ferons aucune réflexion sur des matières qui sont approfondies et longuement traitées dans le livre X.

Deuxième observation. – « L’art avec lequel les mouvements des divers corps d’armée ont été dérobés à la connaissance de l’ennemi, au début de la campagne, ne saurait être trop remarqué. Le maréchal Blucher et le duc de Wellington ont été surpris ; ils n’ont rien vu, rien su de tous les mouvements qui s’opéraient près de leurs avant-postes.

« Pour attaquer les deux armées ennemies, les Français pouvaient déborder leur droite, leur gauche, et percer leur centre. Dans le premier cas, ils déboucheraient par Lille, et rencontreraient l’armée anglo-hollandaise ; dans le second, ils déboucheraient par Givet et Charlemont, et rencontreraient l’armée prusso-saxonne. Ces deux armées restaient réunies, puisqu’elles seraient pressées l’une sur l’autre, de la droite sur la gauche et de la gauche sur la droite. L’Empereur adopta