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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/214

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constitution de l’an VIII, l’était pour dix ans, la nation avait prolongé sa magistrature pour sa vie ; elle l’éleva sur le trône, qu’elle rendit héréditaire dans sa famille. Les principes de la souveraineté du peuple, de la liberté, de l’égalité, de la destruction du régime féodal, de l’irrévocabilité des ventes des domaines nationaux, de l’indépendance des cultes, se trouvaient consolidés. Le gouvernement de la France, sous cette quatrième dynastie, était fondé sur les mêmes principes que la république : ce fut une monarchie constitutionnelle et tempérée. Il y avait autant de différence entre le gouvernement de la France sous cette quatrième dynastie et la troisième, qu’entre celle-ci et la république. La quatrième dynastie succéda à la république, ou plutôt n’en fut qu’une modification.

Aucun prince ne monta sur le trône avec des droits plus légitimes que Napoléon. Le trône fut déféré à Hugues Capet par quelques évêques et quelques nobles ; le trône impérial fut donné à Napoléon par la volonté de tous les citoyens, constatée trois fois d’une manière solennelle. Le pape Pie VII, chef de la religion catholique, apostolique et romaine, religion de la majorité des Français, passa les Alpes pour oindre l’Empereur de ses propres mains, et environné de tous les évêques de la France, de tous les cardinaux de l’Église romaine et des députés de tous les cantons de l’empire. Les rois s’empressèrent de le reconnaître : tous virent avec plaisir cette modification faite à la république, qui mettait la France en harmonie avec le reste de l’Europe, consolidait le bonheur et l’état de cette grande nation. Les ambassadeurs des empereurs d’Autriche et de Russie, ceux de Prusse, d’Espagne et de Portugal, de Turquie, d’Amérique, enfin de toutes les puissances, vinrent complimenter l’Empereur. L’Angleterre seule n’envoya personne, ayant violé le traité d’Amiens, et s’étant mise de nouveau en guerre avec la France ; mais elle-même approuva ces changements. Lord Whithworth, dans les négociations secrètes qui eurent lieu par l’intermédiaire du comte Malouet, et précédèrent la rupture de la paix d’Amiens, proposa, de la part de son gouvernement, de reconnaître Napoléon comme roi de France, s’il voulait accéder à la cession de Malte. Le Premier Consul répondit que si jamais le bien de la France devait exiger qu’il montât au trône, ce ne serait que par la libre et seule volonté du peuple français. Lorsque depuis lord Lauderdale se rendit à Paris en 1806 pour négocier la paix entre le roi d’Angleterre et l’Empereur, il échangea ses pouvoirs, comme le prouve le protocole des négociations, et négocia avec le plénipotentiaire de l’Empereur. La mort de Fox fit échouer les négociations de lord Lau-